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SERVITEURS OU ADORATEURS ?

Dans notre précédent article nous avons donné une définition de l’adoration en disant qu’adorer Dieu c’est lui donner l’hommage et le respect qui lui sont dus, avec crainte et amour. Les trois réflexions que nous avons partagées nous ont conduit à examiner l’importance des émotions dans l’adoration, car cette dernière ne peut se limiter à un acte cérébral et formel. Nous pouvons affirmer que les émotions constituent une composante essentielle de l’adoration.

En réalité, la question n’est pas de savoir si les émotions ont leur place ou non dans l’adoration, mais de vérifier si nous n’en faisons pas un usage abusif et artificiel. La tentation est parfois grande pour un responsable d’église, ou un conducteur de louange, de vouloir produire une atmosphère par un ensemble de techniques appropriées. On part du principe qu’il faut ressentir quelque chose, alors on essaie de le produire soi-même, en établissant une ambiance stéréotypée.


Quand on tombe dans ce piège, la simplicité fait place à la sophistication, et l’église ressemble davantage à un plateau de télévision qu’à un lieu saint où règne la douce et glorieuse présence de Dieu. Bien sûr, adorer nous permet d’éprouver des sensations que nous ne connaîtrions pas ailleurs, car nous nous retrouvons à ce moment dans la présence manifeste de Dieu. Nous reviendrons sur le plaisir de l’adoration un peu plus tard, mais il est capital de se souvenir qu’il ne faut pas confondre adoration et satisfaction personnelle...


Avez-vous remarqué que dans ce que nous avons dit dans les trois points que nous avons développés, la personne qui revient le plus souvent c’est « nous » ? C’est afin de recevoir pour nous-mêmes, que nous allons à l’église. Ou alors c’est parce que c’est notre devoir. Ou encore, nous louons parce que cela nous fait un bien inestimable de communier avec notre Père céleste. Toutefois, gardons présent à l’esprit qu’adorer consiste principalement à donner à Dieu. L’important ce n’est pas ce que nous recevons nous, quand bien-même, nous le recevons en faisant quelque chose (chanter, prier, psalmodier, etc.), mais ce que Dieu reçoit de notre part, parce que nous aurons mis tout notre cœur à lui donner en priorité. Et ce qui est vrai collectivement, l’est aussi individuellement…


J’aimerai maintenant partager avec vous deux illustrations concernant cette notion de donner comme acte d’adoration, avec crainte et amour. La première se trouve dans l’Ancien, et la seconde dans le Nouveau Testament :


1. Le parfum de l’encens dans le Tabernacle

Si nous lisons attentivement l’Ancien Testament, nous découvrons que Dieu donne de nombreuses instructions sur la façon dont l’adoration devait être conduite dans le Tabernacle, cette grande tente que Moïse avait dressée sur l’ordre de l’Eternel, pour que les israélites y offrent leur culte. Beaucoup de ces instructions comportent une grande valeur symbolique, et véhiculent des enseignements clés pour ce qui touche à l’adoration. Lisons par exemple Ex 30.34-38 :

34 L’Eternel dit à Moïse : Prends des aromates, du stacté, de l’ongle odorant, du galbanum, et de l’encens pur, en parties égales.

35 Tu feras avec cela un parfum composé selon l’art du parfumeur ; il sera salé, pur et saint.

36 Tu le réduiras en poudre, et tu le mettras devant le témoignage, dans la tente d’assignation, où je me rencontrerai avec toi. Ce sera pour vous une chose très sainte.

37 Vous ne ferez point pour vous de parfum semblable, dans les mêmes proportions ; vous le regarderez comme saint, et réservé pour l’Eternel.

38 Quiconque en fera de semblable, pour le sentir, sera retranché de son peuple.

Nous pouvons noter cinq choses concernant la composition de cet encens : 1) La formule vient de Dieu en personne. 2) Il était très parfumé. 3) Il faisait partie des choses sacrées et réservées à Dieu. 4) Il devait être utilisé quand Dieu descendait rencontrer son peuple. 5) Il était interdit, sous peine de mort, de le contrefaire pour soi-même.

Qu’est-ce que nous apprenons ici ? La leçon me semble évidente : Dieu voulait inculquer aux israélites qu’il désirait recevoir quelque chose d’unique, et qui lui soit agréable, lorsqu’ils souhaitaient s’approcher de lui dans l’adoration ! Divers éléments interviennent dans ce culte agréable :

1. Le parfum parle du plaisir et de l’amour que Dieu doit retirer de notre adoration.

2. Le fait que cet encens soit salé, pur et saint, représente la ferveur, la sainteté et la consécration de notre cœur envers le Seigneur.

3. Si Dieu insiste pour qu’il soit réservé à cet unique usage, c’est parce qu’il réclame l’exclusivité de nos affections spirituelles, sans que celles-ci soient partagées avec quoi que ce soit d’autre.


Nous avons dans ces versets une des plus belles illustrations de l’adoration : le croyant devrait adorer avec amour et crainte, pour l’unique plaisir de Dieu. Le point capital de ce passage, c’est que l’adoration est une initiative divine. En d’autres termes, c’est Dieu en personne qui a institué l’adoration pour son peuple. L’adoration n’est pas une idée humaine. Cela vient souverainement de Dieu. Elle ne découle pas d’un programme religieux, et n’a pas pour but d’amadouer une divinité irritée. Elle fait partie du plan de Dieu, qui désire par-dessus tout entretenir avec son enfant, une relation intime et affectueuse, empreinte de respect et d’admiration.


2. Le parfum de l’onction de Marie de Béthanie.

Dans le Nouveau Testament, nous avons également l’exemple d’un parfum qui fut offert comme acte d’adoration, mais cette fois-ci, ce n’est pas au Dieu invisible qui venaient dans le lieu très saint du Tabernacle, mais au Dieu fait homme, le Seigneur Jésus-Christ, le divin Fils de Dieu, dans la simplicité d’une maison. Jn 12.1-8 déclare :

1 Six jours avant la Pâque, Jésus arriva à Béthanie, où était Lazare, qu’il avait ressuscité des morts.

2 Là, on lui fit un souper ; Marthe servait, et Lazare était un de ceux qui se trouvaient à table avec lui.

3 Marie, ayant pris une livre d’un parfum de nard pur de grand prix, oignit les pieds de Jésus, et elle lui essuya les pieds avec ses cheveux ; et la maison fut remplie de l’odeur du parfum.

4 Un de ses disciples, Judas Iscariot, fils de Simon, celui qui devait le livrer, dit :

5 Pourquoi n'a-t-on pas vendu ce parfum trois cents deniers, pour les donner aux pauvres ?

6 Il disait cela, non qu’il se mît en peine des pauvres, mais parce qu’il était voleur, et que, tenant la bourse, il prenait ce qu’on y mettait.

7 Mais Jésus dit : Laisse-la garder ce parfum pour le jour de ma sépulture.

8 Vous avez toujours les pauvres avec vous, mais vous ne m’avez pas toujours.


Il n’est pas question pour nous aujourd’hui d’offrir du Chanel ou du Hugo Boss pendant le culte, car nous avons déjà établi la valeur symbolique du parfum qui représente l’adoration. Mais il y a un principe important à retirer de ce passage, surtout lorsque nous considérons les différents personnages, un principe qui nous rappelle les trois réflexions que nous nous sommes faites précédemment :


1. Lazare avait été ressuscité par Jésus, et il était tranquillement assis à table, attendant d’être servi. Il avait eu son miracle, et était bien content. Il représente les croyants qui vont à l’église pour recevoir de la part du Seigneur. Ils ne pensent pas à donner, ils sont présents pour recevoir. Le moins qu’on puisse dire, c’est que Lazare n’avait pas une attitude d’adoration. Lazare est typique du croyant qui ramène tout à lui.


2. Marthe était connue pour son zèle à servir. Elle ne restait pas les bras croisés, elle connaissait ses responsabilités et les assumait avec brio. Etant donné que Jésus avait ressuscité son frère, le moins qu’elle puisse faire, c’était de le servir. Elle évoque les croyants qui sont motivés par le sens du devoir. Ils donnent au Seigneur, en pensant principalement à leurs responsabilités, mais au détriment de ce que Dieu aimerait recevoir. L’Evangile jette une lumière sur ce genre d’attitude dans Lu12.38-42 :

38 Comme Jésus était en chemin avec ses disciples, il entra dans un village, et une femme, nommée Marthe, le reçut dans sa maison.

39 Elle avait une sœur, nommée Marie, qui, s’étant assise aux pieds du Seigneur, écoutait sa parole.

40 Marthe, occupée à divers soins domestiques, survint et dit : Seigneur, cela ne te fait-il rien que ma sœur me laisse seule pour servir ? Dis-lui donc de m'aider.

41 Le Seigneur lui répondit : Marthe, Marthe, tu t’inquiètes et tu t’agites pour beaucoup de choses.

42 Une seule chose est nécessaire. Marie a choisi la bonne part, qui ne lui sera point ôtée.


Nous voyons Marthe toujours occupée à servir. Elle est agacée que sa sœur Marie n’agisse pas comme elle, et reste assise aux pieds de Jésus à écouter son enseignement, alors qu’il y a tant à faire. Marthe va donc se plaindre auprès de Jésus. Mais le Seigneur lui donne tort, en disant que c’est Marie qui a fait le bon choix ! A cette occasion précise, il était plus important d’écouter sa parole, que de s’affairer par sens du devoir comme Marthe.


Quelqu’un pourrait dire : « Mais si Marthe ne s’occupait pas du repas, personne ne serait nourri » … Je crois que si cela était nécessaire, Jésus aurait créé de la nourriture, comme il l’a fait à deux reprises pour nourrir la foule immense qui s’était entassée pour recevoir son enseignement (cf. Mt 14.15-21 et 15.32-38). Nous voyons que Marthe faisait ce qu’elle estimait nécessaire, sans se demander ce qui comptait le plus pour Jésus.


Marie, elle, avait compris que ce qui importait davantage au Seigneur, c’était de se tenir à ses pieds pour l’écouter, pendant qu’il était présent au milieu d’eux. Et cela ne faisait rien à Jésus que Marthe soit seule à servir, par contre cela lui plaisait que Marie écoute son enseignement. Comme Marthe, certains croyants servent avec zèle, mais ne se demandent pas si c’est réellement ce que Dieu veut. Ce qu’ils font, ils le font pour satisfaire leur sens du devoir, sans s’inquiéter si Dieu lui, est satisfait...


3. Marie avait pris un parfum de grand prix, et en avait oint les pieds de Jésus, qu’elle essuyait ensuite à l’aide de ses cheveux. Elle est une figure des croyants qui ont compris qu’adorer Dieu, est une expérience riche en émotions. Mais nous ne voyons pas en Marie une « accro de sensations personnelles », car elle voulait par-dessus tout, faire plaisir au Seigneur, et n’a pas hésité à donner ce qu’elle avait de plus cher, sans se préoccuper de ce qu’elle ressentirait tout d’abord. Elle a fait preuve d’abnégation (elle donne un parfum très cher) et d’humilié (elle essuie avec ses cheveux qui représente sa gloire selon 1 Co 11.15).


La leçon que nous retirons de ce texte est directement lié à ce que nous venons de dire sur ses trois personnages. Sommes-nous des chrétiens Lazare, des chrétiens Marthe, ou des chrétiens Marie ? En d’autres mots, sommes-nous préoccupés par nous-mêmes ou par le plaisir de Dieu ? Sommes-nous orientés service ou adoration ? L’un ne doit pas éclipser l’autre, mais n’oublions pas que satisfaire le Seigneur, est de loin plus important que chercher notre satisfaction personnelle.


Faisons attention que le pragmatisme – la réussite à tout prix – ne dicte toutes nos actions dans notre marche avec Dieu. Nos programmes n’ont-ils pas pris la place de Dieu dans notre cœur ? Sommes-nous tant affairés, comme Marthe, que nous manquons de répondre au cœur de Jésus ? Tout comme l’onction de Marie a rempli la maison d’un doux parfum, seule l’adoration qui donne à Dieu dans l’amour, la crainte et l’humilité, laissera dans les communautés chrétiennes le parfum de la présence bienfaisante du Seigneur.


La remarque de Jésus à Judas Iscariot est parlante également. Jésus dit que les pauvres seront toujours là, et que les occasions pour leur faire du bien ne manqueront pas, mais que c’était le moment pour faire du bien au Seigneur lui-même. Bien sûr, nous devons nous occuper des nécessiteux, mais notre première affection est pour Jésus par l’adoration. Cela signifie que ce que nous faisons au Seigneur, est plus important que ce que nous faisons pour les hommes. Adorer c’est faire au seigneur, servir, c’est faire pour les hommes ! Cela nous permet d’établir la distinction entre le ministère et l’adoration.


Le ministère est ce qui descend du Père par le Fils, dans la puissance du Saint-Esprit, pour nous édifier selon 1 Co 12.4-6 :

4 Il y a diversité de dons, mais le même Esprit ;

5 diversité de ministères, mais le même Seigneur ;

6 diversité d’opérations, mais le même Dieu qui opère tout en tous.


L’adoration est ce qui monte de nous vers le Père par le Fils, dans la puissance de l’Eprit, pour l’unique satisfaction de Dieu selon Ep 2.18 : Car par lui (Jésus) nous avons les uns et les autres accès auprès du Père, dans un même Esprit. Voilà une autre belle définition de l’adoration : adorer, c’est pratiquer l’accès que nous avons auprès de Dieu...


Le problème est que nous sommes parfois trop orientés vers le ministère comme Marthe, et pas suffisamment vers l’adoration comme Marie. Puisse Dieu nous animer de la passion de l’intimité avec lui, comme doivent l’être de vrais adorateurs ! Je crois également que pour maintenir l’équilibre entre le ministère (= service) et l’adoration, il est capital de comprendre que, même si nous parlons de culte et de célébration, que cela soit collectif ou individuel, l’adoration ne se limite pas à des actes spécifiquement à caractère religieux, mais englobe tous les aspects de notre vie quotidienne.


Jésus dit dans Jn 4.23 : Mais l’heure vient, et elle est déjà venue, où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité ; car ce sont là les adorateurs que le Père demande. Nous pouvons noter que Dieu ne demande pas des individus qui adorent – ce qui parle d’activité – mais il demande des adorateurs – ce qui se réfère à l’identité. Alors ma question est : Sommes-nous des serviteurs ou des adorateurs ? Si le service occupe davantage de place que l’adoration, c’est peut-être parce que nous n’avons pas encore saisi l’impact de l’adoration dans la vie de la foi. C’est ce que nous verrons dans nos prochains articles.


A bientôt...


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