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DIEU N’EST PAS LE MONSTRE QUE NOUS CROYONS

Dans le précédent article, nous avons commencé à réfléchir à la question « Dieu est-il coupable de génocide ? » Nous avons passé en revue quelques-unes des tentatives d’explication du problème soulevé par l’ordre d’extermination que Dieu a clairement donné à Israël lorsque celui-ci est allé à la conquête du pays de Canaan. Nous avons conclu qu’aucune de ces explications n’étaient valables, et qu’il était nécessaire de donner du sens à ces textes troublants de l’Ancien Testament :

Jos 6.21 : Ils dévouèrent par interdit, au fil de l'épée, tout ce qui était dans la ville, hommes et femmes, enfants et vieillards, jusqu'aux bœufs, aux brebis et aux ânes.

Jos 10.40 : Josué battit tout le pays, la montagne, le midi, la plaine et les coteaux, et il en battit tous les rois ; il ne laissa échapper personne, et il dévoua par interdit tout ce qui respirait, comme l'avait ordonné l'Éternel, le Dieu d'Israël.

Comme promis, je voudrais vous proposer certaines directives interprétatives pour traiter le problème de savoir si oui ou non, Dieu est-il coupable de génocide ? Voici quelques observations qui nous aideront à aborder le problème apparent posé par le livre de Josué. Laissez-moi partager avec vous deux arguments qui veulent démontrer que Dieu n’est pas le monstre que nous croyons.


Bien que je ne sois pas réellement convaincu par le premier argument, je dois quand même vous en informer. De nombreux chercheurs ont affirmé que dans le Proche-Orient ancien, il existait une manière standard et stéréotypée de parler de la guerre, une manière dans laquelle des affirmations absolues sur une victoire totale étaient souvent faites, et qui dépassaient ce qui se passait réellement dans la réalité. En d’autres termes, les choses étaient vraiment exagérées, un peu comme on le fait dans les caricatures. Je vous rappelle que la caricature est une représentation qui utilise la déformation, l'exagération et l’amplification de certains détails.


Certains chercheurs soutiennent donc que Josué décrit souvent la conquête de Canaan en utilisant la même rhétorique exagérée que celle qui était courante à cette époque chez de nombreux peuples. Par exemple, quand il est dit dans Jos 10.40 : Il ne laissa échapper personne, et il dévoua par interdit tout ce qui respirait, il ne faut pas déduire qu’absolument tout le monde a été exterminé, parce que cela est contredit par la suite. En effet, nous lisons dans Jg 1.27-32 :

27 Manassé ne chassa point les habitants de Beth Schean et des villes de son ressort, de Thaanac et des villes de son ressort, de Dor et des villes de son ressort, de Jibleam et des villes de son ressort, de Meguiddo et des villes de son ressort ; et les Cananéens voulurent rester dans ce pays.

28 Lorsqu'Israël fut assez fort, il assujettit les Cananéens à un tribut, mais il ne les chassa point.

29 Éphraïm ne chassa point les Cananéens qui habitaient à Guézer, et les Cananéens habitèrent au milieu d'Éphraïm à Guézer.

30 Zabulon ne chassa point les habitants de Kitron, ni les habitants de Nahalol ; et les Cananéens habitèrent au milieu de Zabulon, mais ils furent assujettis à un tribut.

31 Aser ne chassa point les habitants d'Acco, ni les habitants de Sidon, ni ceux d'Achlal, d'Aczib, de Helba, d'Aphik et de Rehob ;

32 et les Asérites habitèrent au milieu des Cananéens, habitants du pays, car ils ne les chassèrent point.


Il est évident que certains des peuples mêmes qu’Israël était censé avoir complètement détruits, étaient encore vivants et présents dans le pays à l’époque des Juges. Donc, selon ces experts, Josué utilisait simplement la façon de s’exprimer de son époque lorsqu’il disait qu'il avait complètement battu et vaincu l'ennemi. Il s’agissait d’un langage universel pour souligner la nature profonde de la victoire, mais cela n’avait pas pour objectif de suggérer que chaque être vivant avait été littéralement tué. A l’instar de ses contemporains, Josué utilisait donc un vocabulaire exagéré, plein de vantardise et décrivant une dévastation totale, dans le seul but d’affirmer la réalité de la victoire.


Ces chercheurs citent également l'exemple des Amalécites. Nous lisons dans 1 S 15.3 cet ordre donné à Saül : Va maintenant, frappe Amalek, et dévouez par interdit tout ce qui lui appartient ; tu ne l'épargneras point, et tu feras mourir hommes et femmes, enfants et nourrissons, bœufs et brebis, chameaux et ânes. Pourtant, nous lisons plus tard dans 1 S 27.8 : David et ses gens montaient et faisaient des incursions chez les Gueschuriens, les Guirziens et les Amalécites ; car ces nations habitaient dès les temps anciens la contrée, du côté de Schur et jusqu'au pays d'Égypte. Il s’agit des mêmes Amalécites que Saül était censé avoir complétement exterminés…


Mais qu'en est-il de ces passages dans le livre de Josué qui parlent de la destruction de tous les « hommes et femmes, enfants et vieillards » ? Selon ces experts bibliques, il s'agit peut-être d'un langage stéréotypé pour décrire l'ensemble d'une ville ou d'un pays, sans nécessairement suggérer que chaque être humain aurait été tué. Beaucoup pensent qu'en réalité, seuls les dirigeants politiques et les combattants militaires armés ont été tués. Les non-combattants, ou ce que nous appelons « les civils », n'ont pas été tués. Les mots « femmes, enfants et vieillards » étaient donc des expressions courantes pour illustrer la totalité, même si ni les femmes, ni les enfants, ni les vieillards n'étaient pas littéralement présents. Encore une fois, ce premier argument ne me convainc pas complètement, même si je le partage avec vous.


Selon un deuxième argument, nous devons nous rappeler qu'Israël n'a pas reçu cet ordre d’extermination en raison d'une quelconque supériorité morale, ce qui est explicitement précisé dans De 9.5 : Non, ce n'est point à cause de ta justice et de la droiture de ton cœur que tu entres en possession de leur pays ; mais c'est à cause de la méchanceté de ces nations que l'Éternel, ton Dieu, les chasse devant toi, et c'est pour confirmer la parole que l'Éternel a jurée à tes pères, à Abraham, à Isaac et à Jacob. En fait, Israël lui-même était menacé d’un sort identique s’il se rebellait contre Dieu. C’est ce que nous voyons dans De 8.19-20 :

19 Si tu oublies l'Éternel, ton Dieu, et que tu ailles après d'autres dieux, si tu les sers et te prosternes devant eux, je vous déclare formellement aujourd'hui que vous périrez.

20 Vous périrez comme les nations que l'Éternel fait périr devant vous, parce que vous n'aurez point écouté la voix de l'Éternel, votre Dieu.


C’est d’ailleurs ce qui s'est passé. Au cours de l'histoire de l'Ancien Testament, il y a eu beaucoup plus d'Israélites qui sont tombés sous le jugement de Dieu, que de non-Israélites. Cependant, une autre facette importante de cette question et ignorée de beaucoup de monde, c’est que les Cananéens étaient probablement le peuple le plus dépravé, le plus débauché et le plus dégénéré du monde antique. Cela est attesté par les découvertes archéologiques et historiques dignes de confiance.


Par exemple, les Cananéens s'adonnaient régulièrement à la prostitution religieuse comme moyen d'accroître la fertilité de la terre. Il faut savoir que dans la religion Cananéenne, la productivité de la terre et la qualité de la récolte, dépendait de la relation sexuelle entre le dieu païen Baal et son homologue féminin Astarté (encore appelée Anath). Les gens de l’époque croyaient qu'ils pouvaient inciter les dieux à copuler, en s’accouplant eux-mêmes. Ils ont donc construit des temples et des sanctuaires élaborés, dans lesquels les hommes pouvaient avoir des relations sexuelles avec l'une des nombreuses prostituées sacrées. L'homme s'imaginait remplir le rôle de Baal et la femme celui d'Astarté. Ils pensaient que cela inciterait Mr. et Mme Baal à faire ce qu'ils avaient à faire, ce qui se traduirait ensuite par la pluie et une récolte abondante.


Aussi malsain que cela ait pu être, ce n'était encore rien comparé à d'autres activités religieuses, comme les sacrifices d'enfants. En effet, les nourrissons et les jeunes enfants étaient sacrifiés par le feu au dieu Moloc (Cf. 2 R 23.10). On peut d’ailleurs se rendre compte de toute l'étendue de la perversité cananéenne en prenant connaissance du chapitre 18 du Lévitique. En plus des sacrifices d’enfants, Dieu y interdit l'inceste et la bestialité (c’est-à-dire les relations sexuelles avec des animaux) qui étaient pratiquées par les Cananéens. Lévitique chapitre18 se termine par cette déclaration aux v.24-27 :

24 Ne vous souillez par aucune de ces choses, car c'est par toutes ces choses que se sont souillées les nations que je vais chasser devant vous.

25 Le pays en a été souillé ; je punirai son iniquité, et le pays vomira ses habitants.

26 Vous observerez donc mes lois et mes ordonnances, et vous ne commettrez aucune de ces abominations, ni l'indigène, ni l'étranger qui séjourne au milieu de vous.

27 Car ce sont là toutes les abominations qu'ont commises les hommes du pays, qui y ont été avant vous ; et le pays en a été souillé.


Ainsi, les Cananéens ont rendu des comptes à la justice. Nous savons également que le jugement contre les habitants de Canaan n'est venu qu'après une grande patience et une opportunité remarquable de repentance selon Ge 15.16 : A la quatrième génération, ils reviendront ici ; car l'iniquité des Amoréens n'est pas encore à son comble. Ce verset nous montre que Dieu avait donné aux Cananéens des siècles pour se repentir. Mais ils ont abusé de la patience de Dieu, Ils l'ont peut-être prise pour de l'indifférence et se sont livrés à des péchés encore plus grands (Cf. Je 18.7-10).


Nous devons également nous rappeler que la survie d'Israël et du monde était en jeu à cause de l'influence envahissante et dépravant des péchés des Cananéens (Cf. De 7.1-4). Nous savons, en effet, que chaque fois qu’Israël n'a pas obéi à l'ordre de Dieu d'exterminer les Cananéens, ces derniers ont pollué le peuple élu. Les rois de Juda pratiquaient les sacrifices d'enfants (Cf. 2 R 16.2-3). La perversion sexuelle, la magie et la nécromancie étaient devenues endémiques en Israël (Cf. 2 R 23.7, 21.6). D'autres exemples pourraient être donnés, mais le point est le suivant : Dieu, en tant que médecin de l'humanité, trouve parfois « nécessaire d'amputer une jambe qui se gangrène afin de sauver le reste du corps ».


Avant de tirer des conclusions injustifiées sur la façon dont Dieu a traité les Cananéens, pensez au déluge de Noé ! Nous y voyons l'extermination de la quasi-totalité de la race humaine à cause de son péché, à l'exception de huit individus. On ne rencontre généralement personne qui s'oppose à la justice divine manifestée lors du déluge… Pourtant, certains protestent bruyamment contre l’extermination des Cananéens par Josué et les armées d'Israël. Mais si Dieu était dans son droit lorsqu'il a envoyé le déluge, nous pouvons être assurés que ce n'était pas un acte d'homicide injustifié de sa part de donner l'ordre à Josué d’exterminer les Cananéens.


En dépit de ce qui a été dit jusqu'à présent, beaucoup sont encore mal à l'aise avec ce qu'ils lisent dans Deutéronome et Josué. Cela est souvent dû au fait que l'on suppose que tous les hommes ont un droit fondamental à la vie que Dieu lui-même doit honorer. Notez ceci : nous devons faire la distinction entre le « droit à la vie » auquel se réfère le mouvement pro-vie et celui dont nous parlons ici. Il va de soi qu’aucun humain n'a le droit de prendre illégalement la vie d'un autre humain. L'enfant à naître a le droit, en vertu de la loi, d'être protégé du meurtre. Lorsqu'un fœtus meurt d'une fausse couche spontanée, nous n'accusons pas Dieu de meurtre. La vie appartient à Dieu, pas à l'homme. Lorsque Dieu donne la vie, nous ne pouvons pas la prendre. Mais Dieu peut faire de la vie ce qu'il veut. Il est donc important de se rappeler que le « droit à la vie » régit nos relations entre nous, mais pas la relation entre Dieu et nous.


Nous demandons donc : « Comment un Dieu juste et aimant peut-il causer l'extermination de personnes innocentes à Jéricho ? » La réponse est : « Il ne l'a pas fait ! Pas une seule personne innocente à Jéricho n'est morte, comme ce fut le cas pour Rahab, la repentie ». Considérez le cas de Sodome et Gomorrhe, et la demande d'Abraham que Dieu ne tue pas les justes avec les injustes (Cf. Ge 18.23-33). Dieu aurait épargné la ville entière si seulement dix personnes justes ou innocentes avaient pu être trouvées, mais il n'y en avait pas. Seul Lot et ses deux filles en réchappèrent…


Je suggère donc que le mystère de l’extermination des Cananéens, au regard de leur dépravation et de la liste infâmes de leurs crimes, n'est pas que Dieu les ait tous exterminés, mais qu'il ne les ait pas exterminés plus tôt... Nous avons présumé d'un mythique « droit à la vie », et sommes donc choqués par la mort. En fait, nous devrions être choqués, non par la mort, mais par la vie de tant de coupables, dont nous faisons partie par nature, en raison de nos péchés. Ce qui est étonnant, ce n'est pas que Dieu, dans sa colère, ait exterminé les Cananéens. Ce qui est étonnant, c'est qu'il n'ait pas exterminé tout le monde. Et pourquoi ne l'a-t-il pas fait ? La seule explication se trouve dans sa miséricorde qui accompagne sa justice d’une façon qu’il nous est difficile de comprendre. Alors non : Dieu n’est pas le monstre que nous croyons ! Il agit toujours conformément à la connaissance complète de la réalité. Celle-ci peut nous échapper, mais Dieu lui, la connait parfaitement. Il faut juste accepter que nous, nous ne connaissons pas tout. Et ça, c’est une autre affaire.


A bientôt…



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