La doctrine n'est plus très appréciée de nos jours. Dans de nombreuses églises évangéliques, l'ignorance de la doctrine est telle que même les fondements du christianisme ne sont pas bien compris. Même dans les églises qui restent fidèles dans leur enseignement et leur prédication, il y a souvent peu d'intérêt pour l'apprentissage et la compréhension de la doctrine. Les jeunes s'ennuient pour la plupart et leurs aînés se contentent d'une connaissance superficielle des doctrines de la foi évangélique.
La situation n’est pas meilleure dans les églises charismatiques qui mettent davantage l’emphase sur l’expérience que sur la connaissance de la vérité biblique. Cela veut-il dire qu’il faille rejeter l’expérience ? Bien sûr que non, car le vrai Christianisme est une question de « vie », or là où il y a la vie, il y a nécessairement « expérience » ! Le problème c’est quand la recherche de l’expérience occupe la première place dans l’esprit du croyant. C’est triste à dire, mais dans les communautés charismatiques, la soif d’expérience a détrôné la soif de Dieu…
Pour le dire autrement : Dieu a été réduit à une expérience, et de préférence à une expérience agréable et excitante. Il est urgent que les chrétiens fassent la différence entre la personne de Dieu et « l’expérience ». Nous pouvons vivre des expériences exaltantes accompagnées de passages bibliques sans que Dieu soit présent. Si cela vous étonne, c’est parce que vous n’avez pas conscience de la capacité de séduction du diable. Il est, depuis le commencement, passé maître dans l’art de se servir de ce que Dieu dit (= les passages bibliques ») pour tromper et séduire l’être humain.
Je n’invente rien : c’est bien ce que nous voyons dans le chapitre trois du livre de la Genèse. Tout d’abord dans les cinq premier versets, Satan déforme ce que Dieu a dit au premier couple humain concernant l’ordre de ne pas manger le fruit de l’arbre de la connaissance du bien et du mal. Ensuite, au v.6 nous lisons que « La femme vit que l'arbre était bon à manger et agréable à la vue, et qu'il était précieux pour ouvrir l'intelligence ; elle prit de son fruit, et en mangea ; elle en donna aussi à son mari, qui était auprès d'elle, et il en mangea ». Est-ce que vous comprenez ce qui se passe dans ces six versets ?
Le diable séduit Eve par son mensonge (v.4-5), et celle-ci oublie ce que Dieu a dit en se focalisant uniquement sur le caractère exaltant de son expérience : elle « vit que l'arbre était bon à manger et agréable à la vue ». Elle en a déduit « qu'il était précieux pour ouvrir l'intelligence », se mettant ainsi au diapason du mensonge de Satan qui lui avait dit : « le jour où vous en mangerez, vos yeux s'ouvriront, et que vous serez comme des dieux, connaissant le bien et le mal » (v.5). Et nous connaissons tous ce qui a résulté de cette agréable expérience…
Si Eve et Adam n’avaient pas fait passer leur expérience avant Dieu et sa parole, la chute n’aurait pas eu lieu. Nous devons être très vigilants par rapport aux expériences que nous pouvons faire, car elles ne viennent pas toutes forcément de Dieu, même si elles ont un « habillement biblique ». Ce que je veux dire c’est que ce n’est pas parce que des versets de la Bible sont citées en renfort que Dieu est la source de l’expérience. Après quarante ans passés dans la sphère charismatique, je peux vous certifier qu’une grande partie des expériences qui y sont vécues ne sont pas validées par la vérité de la Parole de Dieu…
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Je suis peiné de voir un nombre croissant de croyants charismatiques être induits en erreur par les ruses de Satan, et le plus attristant c’est que l’on ne peut rien leur dire car ils sont – sans s’en rendre compte – les otages de la tyrannie de l’expérience, surtout depuis que la louange a détrôné l’enseignement de la Bible. Ils ne veulent absolument pas que l’on remette en question leurs expériences charismatiques, car ils sont persuadés qu’elles sont légitimes. Ils refusent que leurs expériences soient examinées à la lumière des Écritures et de la théologie. J’ai ainsi des amis charismatiques avec lesquels je ne peux pas partager la Parole de Dieu, car la doctrine n’est pas importante pour eux, car seule compte l’expérience.
A peu près tout et n’importe quoi est accepté sous prétexte que c’est « bon…et agréable ». Au sein d’un mouvement qui prétend avoir redécouvert la présence et la puissance du Saint-Esprit, il est consternant d’assister à un manque de discernement et d’intelligence spirituelle. Il y a très peu de filtre dans le Charismatisme, si bien que toutes sortes d’expériences, même celles qui ne sont pas conforme à la vérité divine, peuvent s’y infiltrer. Et pourquoi ? A cause d’un manque de doctrine solide bâtie sur une étude et une exégèse profondes des Saint-Ecritures.
Très souvent, le symptôme de ce manque de doctrine est une agitation constante pour « une prédication et un enseignement plus pratiques », où une plus grande insistance sur la louange et sur les autres parties du culte, jusqu'à ce que le sermon soit pratiquement évincé. Du côté des prédicateurs eux-mêmes, on trouve de moins en moins d'exposés bibliques et de plus en plus d'illustrations, de récits et de divertissements. Ce qui compte, c’est de plaire à l’auditoire. On oublie que l’église n’est pas un auditoire qu’il faut gagner à sa cause, mais qu’elle est la fiancée de Christ que l’on doit préparer à rencontrer son futur époux.
L'indifférence doctrinale dans la vie privée des chrétiens se manifeste par un désintérêt total pour la lecture de bons ouvrages évangéliques. Dans certains cas, on les achète mais on ne les lit pas ; dans d'autres, il n'y a même pas assez d'intérêt pour les acheter. S'il y a des lectures, elles sont superficielles, le plus souvent il s’agit de livres entrant dans la catégorie des « Comment faire ». C’est ainsi que beaucoup d’auteurs chrétiens publient des ouvrages ou des articles visant à communiquer des formule pour mieux réussir ceci ou cela. Presque rien de substantiel n'est lu, et beaucoup considèrent qu'un livre de doctrine est inintéressant, voire inutile…
Si l'Église et la vie du peuple de Dieu doivent être protégées de la superficialité, du déclin et de tous les problèmes moraux ou éthiques qui nous affligent aujourd'hui, il faut revenir à la doctrine. Pour s'en convaincre, il suffit de regarder la grande Réforme du seizième siècle. Avant tout, la Réforme était un retour à la doctrine après mille ans de ténèbres sous le joug écrasant de la religion officielle de l’Europe à cette époque. Sans un intérêt ou un retour à la doctrine, nous ne pouvons pas espérer un renouveau évangélique. Les croyants continueront de chercher désespérément à vivre des expériences qui risquent de les éloigner encore plus de la vérité.
Jésus n’a pas dit « Vous vivrez des expériences et vous serez libres », mais « Vous connaîtrez la vérité, et la vérité vous rendra libres » (Jn 8.32). Dans 2 Ti 3.16-17, Paul déclare que l'Écriture est utile à beaucoup de choses, mais d'abord à la « didaskalia ». Ce mot grec est traduit dans nos Bibles françaises par « enseigner » : Toute Écriture est inspirée de Dieu, et utile pour enseigner (v.16) ; mais il est aussi traduit par « doctrine » dans d’autres passages, comme par exemple dans Ep 4.14 : Afin que nous ne soyons plus des enfants, flottants et emportés à tout vent de doctrine (didaskalia), par la tromperie des hommes, par leur ruse dans les moyens de séduction ; ainsi que dans 1 Ti 4.6 : En exposant ces choses aux frères, tu seras un bon ministre de Jésus Christ, nourri des paroles de la foi et de la bonne doctrine (didaskalia) que tu as exactement suivie.
La Bible souligne l'importance de la bonne doctrine d’origine divine, en opposition aux doctrines qui peuvent avoir une origine ténébreuse. C’est ce que dit Paul dans 1 Ti 4.1 : Mais l'Esprit dit expressément que, dans les derniers temps, quelques-uns abandonneront la foi, pour s'attacher à des esprits séducteurs et à des doctrines (didaskalia) de démons. Je vous prie de noter les trois expressions de ces différents textes : « tout vent de doctrine », « bonne doctrine » et « doctrines de démons ». Cela nous montre qu’il y a une circulation abondante de toutes sortes de doctrines, et qu’il nous faut être vigilants.
C’est pourquoi : ne négligeons pas l’importance de la doctrine ! Elle n'est pas seulement du ressort des théologiens, mais de celui de tous ceux qui désirent vivre par la foi selon la volonté de Dieu. Ne mettons pas la doctrine de côté au profit de « questions plus pratiques » ou « d’expériences exaltantes », mais comprenons qu'elle réprouve, corrige et enseigne la voie de la justice. Par-dessus tout, elle nous met en présence du Dieu vivant lui-même, en qui « nous avons la vie, le mouvement, et l'être » (Ac 17.28).
Nous devons nous appliquer « de faire honorer en tout la doctrine de Dieu notre Sauveur » (Tit 2.10). Je crois qu’un des passages clés sur l’importance de la doctrine c’est 2 Jn 1.9 : Quiconque va plus loin et ne demeure pas dans la doctrine de Christ n'a point Dieu ; celui qui demeure dans cette doctrine a le Père et le Fils. Il est clair que notre communion avec Dieu repose sur notre fidélité à la doctrine. Si nous mettons de côté la doctrine, cela revient à mettre Dieu de côté. Je conclurai par cette déclaration que je vous invite à méditer, même si elle vous semble ahurissante : « Être sans doctrine, c'est être sans Dieu ».
A bientôt…